C’est précisément là que l’effectuation, cette méthode développée par Saras Sarasvathy, prend tout son sens. Comme elle l’a démontré dans ses travaux, l’effectuation est particulièrement adaptée aux entrepreneurs pionniers confrontés à l’absence de marché ou d’usage établi. Elle offre un cadre robuste pour entreprendre sans certitude, construire en terrain vierge et explorer plutôt que prévoir. […]
Les tâches qui font progresser un entrepreneur : apprendre en pratiquant l’effectuation
Toutes les tâches que réalise un entrepreneur n’ont pas la même valeur d’apprentissage. Une tâche « apprenante » se distingue par sa capacité à produire un feedback rapide, clair et actionnable. C’est ce retour qui permet à l’entrepreneur d’ajuster ses choix, de progresser, et d’ancrer de nouvelles compétences.

Ce sont ces tâches, souvent répétitives, qu’on appelle tâches à fort potentiel d’apprentissage. Elles ne sont pas toujours les plus confortables ni les plus valorisantes sur le moment, mais ce sont elles qui font vraiment progresser.
Résumé
Pour progresser vite et de façon durable, l’entrepreneur doit se concentrer sur les tâches qui le confrontent directement à la réalité de son marché. L’effectuation, en mettant l’accent sur l’action, l’expérience et le feedback, fournit une boussole utile pour choisir où investir son énergie. Ce n’est pas en planifiant seul dans son coin que l’on devient un expert, mais en multipliant les confrontations utiles au terrain.
Comment certaines tâches accélèrent l’apprentissage ?
L’entrepreneur qui pratique une activité à forte valeur d’apprentissage n’agit pas au hasard. Il observe les réactions, analyse les conséquences, puis ajuste sa façon de faire. Cette boucle action > feedback > réflexion > ajustement est au cœur de la logique effectuale.
La valeur d’une tâche dépend de deux critères principaux :
- La qualité du feedback qu’elle permet de recevoir.
- La possibilité de la répéter et de s’entraîner à mieux la réaliser.
Par exemple, pitcher devant différents interlocuteurs permet d’ajuster progressivement son discours, d’affiner ses messages clés, et de mieux comprendre ce qui touche ou convainc. C’est une pratique réflexive, adaptative, et surtout à forte valeur d’expérience.
Quelles sont les tâches clés dans une logique effectuale ?
Selon la grille d’analyse de Read & Sarasvathy, certaines activités quotidiennes de l’entrepreneur ont un potentiel d’apprentissage bien supérieur à d’autres, souvent surinvesties.

On remarque que certaines activités, comme la rédaction d’un business plan, ont un faible retour en termes d’apprentissage car elles ne sont pas testées par le terrain. En revanche, celles qui confrontent directement au marché, aux utilisateurs ou aux partenaires sont d’excellents vecteurs de progression.
Comment s’exercer de manière délibérée pour progresser ?
La pratique délibérée, consiste à identifier les activités qui permettent de s’améliorer, puis à les pratiquer de manière intentionnelle, en visant la progression.
Voici les conditions pour transformer une tâche ordinaire en levier d’amélioration continue :
- Cibler des compétences clés à développer (ex. : convaincre un prospect, synthétiser une proposition de valeur).
- Répéter l’action dans des contextes variés pour gagner en aisance et en adaptabilité.
- Recueillir des retours francs (clients, mentors, pairs).
- Analyser après chaque session : qu’est-ce qui a fonctionné ? qu’est-ce qui a bloqué ? que modifier la prochaine fois ?
Cette approche est particulièrement efficace quand elle est appliquée à des tâches qui structurent le go to market d’un projet : réunions commerciales, tests de valeur, démonstrations produits, prototypages utilisateurs…
Exemple : comment Julien a progressé grâce aux rendez-vous terrain
Julien crée une application pour localiser les restaurants qui ont une politique anti-gaspillage. Il a commencé comme de nombreux entrepreneurs par rédiger un plan, imaginer des fonctionnalités, évaluer un budget et rêver d’une grande base de données. Mais son mentor l’encourage à aller se confronter au terrain.
Julien décide de consacrer deux semaines à appeler 50 restaurateurs. Il envoie des mails, passe des coups de fil, prend des rendez-vous. Il note chaque objection, chaque question, chaque réaction.
- Il découvre que son idée de carte grand public n’intéresse pas les restaurateurs.
- Il comprend que le vrai besoin côté pro, c’est de se différencier dans les appels d’offres et d’attirer les collectivités.
- Il pivote vers une plateforme B2B de labellisation écoresponsable.
Ce qu’il pensait être une série de tâches ingrates (appels, RDV, objections) devient sa meilleure source de révélations stratégiques.
FAQ – Les tâches entrepreneuriales effectuales
Quelles sont les tâches les plus utiles pour progresser en entrepreneuriat ?
Celles qui impliquent un retour direct du marché : entretiens clients, tests utilisateurs, rendez-vous commerciaux, prototypage, pitchs et négociation.
Faut-il faire des cold calls quand on est fondateur de startup ?
Oui. Même si cela peut sembler fastidieux, c’est un excellent moyen de valider une proposition de valeur et de comprendre les objections.
Comment organiser son agenda pour progresser efficacement ?
Planifiez chaque semaine 2 ou 3 activités à feedback direct (RDV client, test, pitch, appel) et bloquez un temps de réflexion pour les analyser.
Les tâches apprenantes sont-elles toujours les plus agréables ?
Non. Elles sont souvent inconfortables car elles nous exposent à l’incertitude ou au rejet. Mais c’est justement ce qui les rend riches en apprentissage.
Peut-on mesurer sa progression grâce aux tâches effectuées ?
Oui. Par exemple : taux de conversion, qualité des retours clients, capacité à répondre aux objections, clarté du pitch, fréquence des améliorations produits.